Dans le Dunkerquois, des murs le long du camp de migrants

miladyrenoirmiladyrenoir
2025-12-11 16:37

https://www.lavoixdunord.fr/1646126/article/2025-11-14/crise-migratoire-dans-l-ouest-dunkerquois-avec-ces-murs-ces-grillages-l

Dans le Dunkerquois, des murs le long du camp de migrants

*Sécurité. Des clôtures, des barbelés ou des murs commencent à déformer le

paysage de l’ouest du Dunkerquois et rappellent ceux qui encerclent la

rocade portuaire ou les installations du tunnel sous la Manche. Certains y

voient les prémices d’une bunkérisation.*

Une présence policière 24h/24 aux abords d’un terrain en friche dans la

zone industrielle de Loon-Plage. Sur cette emprise du Grand Port maritime

de Dunkerque (GPMD), un mur de béton surmonté de barbelés a poussé en moins

d’une semaine le long de la voie ferrée. Partout autour des bâches bleues

emblématiques, qui couvrent les campements de fortune, des centaines de

migrants vivotent là, dans les sous-bois, à deux pas des sites industriels.

La voie ferrée était régulièrement traversée pour permettre aux exilés d’y

installer leur tente. « Le 29 octobre, la police a délogé tout le monde, et

à peine quelques jours plus tard, ils ont commencé à construire ce mur »,

témoigne Diane Léon, de Médecins du Monde.

« Encore plus dangereux »

Des engins de chantier sont toujours à l’œuvre, le mur va s’étendre et

devrait atteindre 1,5 km fin novembre. « Les gens sont en colère car ils

vivaient là !, peste Mohammad, 16 ans, originaire du Soudan. Ils ne

comprennent pas pourquoi du jour au lendemain, on les empêche d’y aller.»

Son campement est installé au pied du mur mais des migrants ont dû se

rapprocher de la route, « c’est encore plus dangereux, il y a beaucoup de

circulation ici», signale Ali, un Érythréen.

Le mur est né d’une concertation entre les services de l’État et le GPMD,

maître d’œuvre et propriétaire du terrain. Et si aucun accident n’a jamais

été recensé sur les voies, « c’est avant tout pour des raisons de sécurité,

plaide la direction du port. Et un sujet de protection humaine aussi bien

pour les personnes qui traversaient ces voies que pour les salariés des

entreprises qui tractent les trains. »

Diane Léon s’interroge : « OK, on les empêche de traverser la voie ferrée

pour des raisons de sécurité mais que leur propose-t-on à la place en

termes d’accueil ? On les condamne juste à l’errance. » L’humanitaire

estime qu’il s’agit là « d’invisibiliser ces personnes. Avec ces murs, ces

grillages, on a l’impression d’être dans le Calaisis ».

Sont-ce les prémices d’une bunkérisation de l’ouest du Dunkerquois ? À

Gravelines, André et Léontine Vérove, 74 et 73 ans, le pensent. Ils se

promènent le long d’une immense clôture surmontée de barbelés avec à

l’arrière la centrale nucléaire. « On dirait un camp retranché ! , lâche

agacé André Vérove. On a l’impression de revenir des années en arrière,

pendant la guerre.» Il y a quatre ans, en raison de la crise migratoire,

EDF, exploitant de la centrale, avait voulu sécuriser ce terrain autour «

car les passeurs venaient cacher leur bateau dans les blockhaus», raconte

Alain Bonnefaes, adjoint au maire à la tranquillité publique. « On voit des

clôtures partout maintenant, regrette Léontine. On ne peut même plus se

promener à certains endroits alors qu’on avait l’habitude d’y aller. »

Des fonds britanniques

Il y a quelques jours, en concertation avec les habitants, la commune aussi

a fait construire une clôture sur 1 km et deux mètres de haut, pour

encercler un bois, à proximité du chenal et de la plage. Un coût de 80 000

euros pris en charge par les fonds britanniques.

« C’était la seule solution, il y avait des intrusions dans les jardins et

les riverains craignaient des incendies en raison des feux allumés dans le

bois, expose Alain Bonnefaes, qui redoute un début de bunkérisation. Ce

n’est pas agréable mais on n’a pas le choix, on n’a pas assez de forces de

l’ordre. Il faudrait une présence permanente. Mercredi soir, on avait

encore 500 migrants qui attendaient ici. » Une situation vectrice de

tensions, dénoncée par des habitants à moult reprises et par un collectif

des maires du littoral, démunis, souvent dépassés par l’ampleur de la crise.