RELAIS DU PIRE DÉJÀ EN PLACE…
L’idéologie Zéro Point de Fixation s’étend en impunité et normalisation.
A RELAYER - DÉNONCER auprès des élu·es, journalistes, assocs…
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De : Maël Galisson
To: la liste des soutiens aux exilés des “jungles” jungles@rezo.net
SOCIÉTÉ
La France se dote de nouvelles méthodes d’interception en mer des migrants
traversant la Manche
Selon un document non public consulté par « Le Monde », la gendarmerie
maritime pourra intercepter en mer des canots pneumatiques avant même
qu’ils embarquent des migrants. La France entérine un changement de
doctrine sous la pression des Britanniques.
Par Julia Pascual
C’est désormais écrit noir sur blanc, de façon confidentielle, mais non
moins officielle. Des opérations d’interception en mer de canots
pneumatiques destinés à convoyer des migrants vers l’Angleterre vont être
menées par la gendarmerie maritime. Selon un document du 25 novembre,
consulté par Le Monde, et signé par quatre préfets – le préfet maritime de
la Manche et de la mer du Nord ainsi que les préfets du Nord, de la Somme
et du Pas-de-Calais –, le cadre opérationnel de ces interventions inédites
est fixé.
Ce texte, attendu depuis plusieurs mois, se trouvait au cœur des
négociations entre Londres et Paris sur la lutte contre les traversées
maritimes qu’ont réussi depuis le début de l’année près
de 40 000 personnes. Au total, depuis l’apparition du phénomène fin 2018,
ce sont 190 000 migrants – originaires d’Iran, d’Afghanistan, d’Irak,
d’Albanie, de Syrie ou encore du Soudan – qui ont réussi à gagner le
Royaume-Uni par la mer. La plupart y demandent et obtiennent l’asile.
Ces traversées, beaucoup plus visibles que les arrivées par camion via le
tunnel sous la Manche ou les ferries, sont un sujet de tension majeur entre
Paris et Londres. Dans une lettre récente envoyée par le premier ministre
travailliste, Keir Starmer, à Emmanuel Macron, et dont Le Monde a pris
connaissance, M. Starmer presse le président français : « Il est essentiel
que nous déployions ces tactiques ce mois-ci », écrit-il au chef de l’Etat.
« Nous n’avons pas de dissuasion efficace dans la Manche », regrette-t-il
encore.
Lors d’un sommet bilatéral entérinant le rapprochement des deux capitales,
en juillet, la France avait concédé au Royaume-Uni le principe d’un
changement de sa doctrine opérationnelle : les forces de l’ordre ne se
contenteraient plus d’empêcher les départs des plages, mais elles seraient
autorisées à intervenir directement en mer.
Viser les taxi-boats
Le sujet est sensible, compte tenu de la dangerosité des manœuvres
d’interception de ces canots pneumatiques souvent de mauvaise facture.
« L’aspect inédit et la sensibilité de ces opérations sous-tendent un
impératif d’évolutivité et d’adaptation », écrivent à ce sujet les quatre
préfets, qui rappellent à plusieurs reprises « la priorité absolue, et
toujours affirmée, qu’est la sauvegarde de la vie humaine ». Néanmoins, des
« opérations programmées » vont avoir lieu, en mer dans un premier temps,
et sous l’autorité du préfet maritime, avant d’être d’être menées dans les
« mers intérieures » que constituent les ports et les chenaux.
Ce sont les gendarmes maritimes qui interviendront, avec une
« embarcation » dévolue « au sauvetage », en appui. En outre, les manœuvres
ne viseront que les « taxi-boats en amont des phases d’embarquement de
migrants ». Le terme de « taxi-boat » désigne des canots qui quittent le
littoral peu chargés et discrètement, et qui longent la côte pour récupérer
plusieurs dizaines de passagers directement dans l’eau. Ce mode de
traversée, qui s’est développé de façon exponentielle, permet aux réseaux
de passeurs de déjouer l’immobilisation des canots sur les plages, puisque,
jusque-là, les forces de l’ordre ne pouvaient pas intervenir en mer.
Selon la note des préfets, la tactique des traversées en taxi-boat est
« quasiment infaillible » (près de 81 % de succès en 2025). Ces canots ont
convoyé en moyenne 67 personnes en 2025, contre 45 en 2023, et représentent
plus de la moitié des arrivées en territoire britannique.
Risque physique et pénal
Lors des interceptions, les gendarmes maritimes devront employer « des
mesures graduées et réversibles couvrant un spectre allant de l’injonction
d’arrêt, à l’immobilisation du moyen, au déroutement et à la remise des
personnes aux autorités compétentes ». Selon une enquête conjointe du Monde
et du média à but non lucratif Lighthouse Reports, parue le 19 novembre,
des filets d’arrêt devraient être employés pour immobiliser les hélices des
taxi-boats.
L’idée d’entraver les traversées en intervenant en mer est loin de faire
l’unanimité au sein de l’administration. Ce sont autant les accidents qui
sont redoutés que le risque pénal encouru par les fonctionnaires
intervenants. Le document consulté par Le Monde précise que le fondement
juridique des interceptions est la commission en flagrance de l’infraction
d’aide au séjour irrégulier. Les procureurs compétents devront être
informés en amont du déploiement du dispositif d’interception.
Conscients que, pour limitées qu’elles soient dans un premier temps, les
interceptions comportent des risques majeurs de naufrage, les préfets
insistent sur les « éléments de langage » à employer autour de ces
manœuvres. Ainsi, écrivent-ils, « la communication cherchera à valoriser la
sauvegarde préventive de la vie humaine grâce à ce type d’intervention et
la judiciarisation des passeurs proposant des traversées dans des
embarcations précaires ».
Julia Pascual