Fwd: Migration : la France accepte un accord de retour avec le Royaume-Uni [Le Monde, 11.07.2025]

miladyrenoirmiladyrenoir
2025-8-10 10:25

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De : Maël Galisson

https://www.lemonde.fr/international/article/2025/07/11/migration-la-france-accepte-un-accord-de-retour-avec-le-royaume-uni_6620583_3210.html

Migration : la France accepte un accord de retour avec le Royaume-Uni

Paris s’est engagé à reprendre les personnes ayant réussi à traverser la

Manche mais non éligibles au droit d’asile

Cécile Ducourtieuxet Julia Pascual (à Paris)

LONDRES- correspondante

Al’issue de la visite d’Etat d’Emmanuel Macron au Royaume-Uni, suivie d’un

sommet France-Royaume-Uni, jeudi 10 juillet, le premier ministre

britannique, Keir Starmer, a confirmé la conclusion d’un accord sur la

migration transManche actant pour la première fois le principe d’un retour

vers l’Hexagone de personnes refoulées du Royaume-Uni après avoir traversé

la Manche en small boats (« petites embarcations »).

Le nombre de personnes concernées devrait s’établir autour de cinquante par

semaine. Un minimum, selon Londres, qui s’engage symétriquement à

accueillir, dans l’autre sens, des personnes dont la nationalité

garantirait presque automatiquement l’asile au Royaume-Uni ou dans le cadre

de regroupements familiaux.

Les cohortes envisagées restent très modestes, rapportées aux

21 000 personnes qui ont traversé le détroit du Pas-de-Calais depuis le

début de l’année (50 % de plus que par rapport à la même période de 2024).

Pour autant, le dirigeant travailliste a qualifié l’accord de

« révolutionnaire ». « Beaucoup de gouvernements ont tenté de le mettre en

œuvre en vain », a affirmé Keir Starmer lors d’une conférence de presse

commune avec Emmanuel Macron, jeudi, depuis Northwood, une base militaire

du nord-ouest de Londres.

Il est vrai que, depuis 2018, quand le phénomène des small boats est apparu

– après le renforcement de la sécurité autour du port de Calais

(Pas-de-Calais) et du tunnel sous la Manche –, la droite britannique

réclamait que Paris accepte le principe de retours des migrants sur son

sol. En parallèle, les Français déploraient qu’il n’existe plus de voie

légale pour demander l’asile au Royaume-Uni. Depuis le Brexit, en 2021,

Londres n’applique plus le règlement de Dublin, qui permettait à quelques

centaines de personnes présentes en Europe de faire valoir des attaches

familiales outre-Manche pour y trouver refuge.

Dans un cadre européen

Pour cet accord « one in, one out » (« une entrée, une sortie »), comme

l’ont baptisé les médias britanniques, Paris et Londres se sont inspirés de

la déclaration entre l’Union européenne (UE) et la Turquie de 2016, au plus

fort de la crise des migrants. Il prévoyait de verser 6 milliards d’euros à

Ankara, en échange de quoi la Turquie devait tenir sa frontière et

reprendre tous les migrants ayant traversé la mer Egée et ayant été

déboutés de leur demande d’asile en Grèce.

Pour chaque Syrien renvoyé en Turquie, un autre Syrien devait être

réinstallé depuis la Turquie dans l’UE. Très controversé, cet accord a

permis, temporairement, de freiner les arrivées. Mais Ankara ne reprend

plus aucun migrant depuis 2020 et les réinstallations de Syriens n’ont

jamais atteint les objectifs de départ.

Le ministère de l’intérieur britannique (Home Office) espère que le plan

franco-britannique sera mis en place dans les semaines qui viennent.

Emmanuel Macron a précisé qu’il doit encore être soumis à vérification

juridique, y compris de la Commission européenne. Signe que Paris veut

replacer ces négociations dans un cadre européen (à défaut d’avoir obtenu

un accord UE-Royaume-Uni), le ministère de l’intérieur a annoncé que

26 gardes-côtes de l’agence Frontex seront déployés dès juillet sur le

littoral.

Concernant les retours vers la France, ne seront concernés que les adultes

arrivés en small boats ; ils seront placés dans des centres de rétention et

informés qu’ils ne sont pas admissibles au Royaume-Uni au motif qu’ils

viennent d’un pays dit « sûr » et qu’ils sont arrivés de manière illégale.

Une fois renvoyées dans l’Hexagone, ils seront à nouveau refoulés s’ils

tentent encore la traversée.

Symétriquement, des personnes présentes en France de nationalités obtenant

presque automatiquement l’asile au Royaume-Uni (Afghanistan, Syrie, etc.)

devraient pouvoir formuler une demande en ligne, par le biais d’un système

développé par le Home Office. Seront aussi considérés des cas de

regroupements familiaux.

Paris a longtemps reproché à Londres de ne pas lutter suffisamment contre

le travail illégal et de refuser d’imposer une carte d’identité à tous ses

citoyens, un moyen d’identifier plus rapidement les personnes sans droit au

séjour. Si la France n’a obtenu aucune garantie en ce sens, le gouvernement

Starmer a néanmoins rappelé que, depuis son entrée en fonction il y a un

an, les opérations de vérifications contre le travail illégal ont augmenté

de 50 %.

Schéma « pragmatique »

Le président Macron a dénoncé les « mensonges » du Brexit qui, au lieu de

limiter la migration vers le Royaume-Uni, aurait agi comme « un facteur

attractif » – le règlement de Dublin ne s’appliquant plus dans le pays, les

demandeurs d’asile enregistrés dans un pays de l’UE ne risquaient pas d’y

être renvoyés. Il a cependant admis que Français et Britanniques n’ont « pas

d’autre choix que de travailler ensemble ». Et qualifié le schéma d’échange

de « pragmatique ».

Sans qu’aucun montant ne soit dévoilé, le Royaume-Uni s’est engagé à

finaliser « le plus rapidement possible » un nouveau cycle de financement

(2026-2029) en vertu du traité de Sandhurst de 2018, selon lequel Londres a

déjà versé 760 millions d’euros à la France pour sécuriser sa frontière.

Une nouvelle doctrine d’intervention des forces de l’ordre en mer pour

empêcher les traversées doit être déployée prochainement.

Alors que le Haut-Commissariat des nations unies pour les réfugiés (HCR)

saluait, jeudi, le projet pilote, les associations qui viennent en aide aux

migrants à la frontière franco-britannique étaient peu enthousiastes. « C’est

absurde et profondément dangereux, considère Michael Neuman, de Médecins

sans frontières. Ce protocole d’échange réplique ce qu’on a connu avec

l’accord UE-Turquie et ses résultats peu convaincants. Il s’inscrit dans

une logique de fermeture des frontières qui crée les conditions de

l’inflation des trafics. »

Les traversées de la Manche empoisonnent la relation franco-britannique, et

l’accord annoncé jeudi est difficile pour Paris et Londres : la droite et

l’extrême droite britanniques se sont empressées, jeudi, de le condamner.

Mais les deux dirigeants sont résolus à tirer un trait sur les tensions

nées du Brexit. C’était tout l’objet de cette visite d’Etat : mettre en

scène une réconciliation.