Fwd: Dans la Manche, des morts sans identité, des familles sans réponses

miladyrenoirmiladyrenoir
2025-6-27 12:09

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Deuxième volet d’une enquête en 3 parties publiée par Médiapart.

https://www.mediapart.fr/journal/france/060625/dans-la-manche-des-morts-sans-identite-des-familles-sans-reponses

Dans la Manche, des morts sans identité, des familles sans réponses

*Procédures interminables, manque de coordination entre les services de

police, absence de partage d’informations avec les proches :

l’identification des corps d’exilés anonymes retrouvés sur les côtes de la

Manche reste très laborieuse. Et repose essentiellement sur le travail des

associations.*

Maïa Courtois, Maël Galisson et Simon Mauvieux

6 juin 2025 à 18h20

LeLe 6 octobre 2023, des restes humains, deux jambes, s’échouent sur une

plage de l’île de Texel, au nord des Pays-Bas. Les premières analyses de

ces restes de corps, dans un état de décomposition avancée, permettent

d’établir l’hypothèse d’un lien avec un naufrage, survenu à 300 kilomètres

de là, entre la France et l’Angleterre, deux mois plus tôt.

Le 12 août 2023, six personnes, toutes d’origine afghane, meurent dans un

naufrage dans la Manche. Ils essayaient de rejoindre les côtes anglaises

dans un zodiac surchargé dans lequel avaient pris place plus de soixante

personnes. Mais le bilan ne s’arrête pas là : Ahmadi Ahmad Jan, 29 ans, et

Samiullah Abdulrahimzaï, 22 ans, sont portés disparus depuis

https://www.mediacites.fr/enquete/lille/2024/01/17/migrants-fuir-kaboul-et-les-talibans-et-disparaitre-dans-la-manche/

.

Dans les semaines qui suivent le naufrage, les noms des deux disparus sont

connus, et leurs familles sont identifiées grâce à un homme, qui n’est ni

enquêteur ni gendarme. Mohammad Amin Ahmadzai est le président de

l’Association solidarité culture et insertion des Afghans (Ascia), qui

vient en aide aux Afghan·es du nord de la France dans leurs démarches

administratives ou organise des événements culturels. À partir d’août 2023,

le président de l’association change drastiquement ses missions et devient

l’intermédiaire privilégié des autorités durant tout le processus

d’identification.

[image: Illustration 1] Ahmadi Ahmad Jan et Samiullah Abdulrahimzaï sont

portés disparus depuis le 12 août 2023 et le naufrage de leur zodiac dans

la Manche. © Photo du téléphone Valentina Camu pour Mediapart

Mohammad Amin Ahmadzai parvient à retrouver les familles des deux disparus

en Afghanistan. Il leur explique les démarches à effectuer pour envoyer des

échantillons d’ADN et il fait la liaison entre les policiers néérlandais et

ceux de la gendarmerie maritime française, chargée de l’enquête.

Une brosse à dents et un casse-tête

C’est dans une simple brosse à dents que la famille de Samiullah

Abdulrahimzaï plaçait tous ses espoirs. Début 2024, elle se rend au Comité

international de la Croix-Rouge (CICR) de Kaboul, la capitale du pays,

contrôlée depuis août 2021 par les talibans. L’ONG est toutefois dans

l’incapacité de réaliser un test ADN, *« **à cause de la situation du pays

et par manque de moyens techniques »*, soutient Mohammad Amin Ahmadzai, en

contact régulier avec les familles. Le président de l’Ascia leur conseille

alors d’envoyer, par eux-mêmes, des échantillons d’ADN.

Plusieurs frères du disparu glissent deux brosses à dents et un peigne dans

un petit sac en plastique. Un cousin de Samiullah Abdulrahimzaï, qui vit en

France, récupère le colis en Iran, puis le confie, en France, au président

de l’ASCIA. À son tour, il le transmet, en septembre 2024, aux enquêteurs

français chargés de l’affaire.

Finalement, fin 2024, le résultat de la comparaison ADN tombe : il est

négatif. Mais au sein de la police néerlandaise, une source bien au fait de

l’enquête indique ne pas avoir de certitude quant à la qualité de

l’échantillon ADN envoyé ni sur sa provenance, rendant ce résultat peu

fiable. Contactée en juin 2025, le cousin de Samiullah Abdulrahimzaï, qui

vit en France, indique ne pas avoir été prévenu, tout comme sa famille en

Afghanistan.

Un téléphone retrouvé dans la poche du pantalon encore accroché aux jambes

a permis à la police française d’établir un lien avec Ahmadi Ahmad Jan, le

deuxième disparu. Mais sans une comparaison ADN fiable, indique notre

source au sein de la police néerlandaise, son identification ne peut être

confirmée avec certitude.

La famille d’Ahmadi Ahmad Jan n’a pas trouvé de moyen de faire parvenir un

test ADN, bien que l’un de ses frères travaille dans un cabinet d’avocats à

Kaboul. *« *Notre famille attend jour et nuit des nouvelles », confiait

Muslim Hanafi Ahmadi, un an après le naufrage. Interrogé fin mai 2025, il

n’avait toujours aucune information des autorités françaises : *« **Personne

ne nous a contactés »*, regrette-t-il.

Car si aux Pays-Bas, où les corps ont été retrouvés, la priorité est donnée

à l’identification et à la remise des corps aux familles, en France,

l’enjeu est tout autre. Pour faire la lumière sur le naufrage meurtrier du

12 août 2023, c’est la juridiction nationale de lutte contre la criminalité

organisée (Junalco) qui tient les rênes de l’enquête.

Son objectif : remonter la filière de passeurs et faire porter aux

organisateurs et aux petites mains la responsabilité des six personnes

mortes lors du naufrage *e*t faire peser, sur les organisateurs de la

traversée et les petites mains, la responsabilité des six personnes

décédées lors du naufrage et du corps nouvellement identifié.

[image: Illustration 2] Les côtes anglaises depuis un bateau au large de

Calais et des femmes, hommes et enfants rescapés d’un naufrage lors d’une

tentative de passage en novembre 2024. © Photo Valentina Camu pour Mediapart

Selon la police néerlandaise, aucune analyse fiable, au regard des critères

scientifiques dont répond la médecine légale, n’a permis d’identifier ces

deux morceaux de corps. Pourtant, le tribunal judiciaire de Paris indique,

fin mai, qu’un des corps retrouvés est *« **visé comme victime dans la

procédure du 13 août 2023 »*.

L’enquête a été close le 5 mai 2025, et le dossier est désormais entre les

mains du parquet de Paris. Parmi les huit personnes mises en examen, deux

sont des exilés, présumés pilotes de l’embarcation et considérés comme

« passeurs » aux yeux de la justice. Ils risquent dix ans de prison.

Les associations de terrain, moteur des enquêtes

Tous les autres dossiers d’identification liés à des naufrages dans la

Manche sur lesquels Mediapart a enquêté entre 2020 et 2024, en lien avec

des proches en attente, se caractérisent par cette lenteur procédurale, des

lacunes dans le partage d’information aux familles et la multiplication des

interlocuteurs.

En théorie, la chaîne de l’identification en France est claire. Lorsqu’un

cadavre est retrouvé sur une plage du littoral, une enquête est ouverte par

le procureur du territoire concerné et confiée au service de police ou de

gendarmerie du lieu de découverte du corps. La dépouille est transférée

dans un institut médico-légal, où l’équipe travaille elle aussi sous le

contrôle du parquet.

Par exemple, dans les semaines qui suivent le naufrage du 23 octobre 2024,

dont le bilan officiel fait état de « seulement » trois victimes –

Mediapart avait révélé

https://www.mediapart.fr/journal/france/081124/calais-les-autorites-comptent-trois-morts-dans-un-naufrage-et-oublient-treize-disparus

que treize personnes étaient en réalité portées disparues –, la Manche

recrache successivement des corps sur les plages du littoral de la côte

d’Opale. Le 2 novembre, un cadavre est découvert sur la plage de Sangatte.

Le 5 novembre, deux corps sont retrouvés en mer au large de Calais, un

autre immergé près de Douvres, dans les eaux territoriales anglaises. Le

lendemain, une dépouille est retrouvée sur la plage de Calais, tandis que

deux nouvelles victimes sont repêchées en mer au large de la cité

portuaire. Au total, entre le 23 octobre et le 21 décembre 2024, la Manche

rejette quatorze corps.

Les autorités laissent les personnes solidaires essayer d’obtenir des

informations comme elles peuvent.

Flore Judet, coordinatrice de L’Auberge des migrants

Différents services de police ou de gendarmerie sont alors mobilisés dans

le but de collecter des éléments qui permettraient d’identifier les

victimes. Dans les faits, les forces de l’ordre, qui ont pour habitude de

procéder toutes les quarante-huit heures à des expulsions de campements

d’exilé·es, se retrouvent rapidement démunies pour obtenir des informations

auprès de compagnons de route ou des proches des personnes exilées mortes.

Elles se reposent dès lors sur le tissu associatif local, dont les

bénévoles sont en contact quasi quotidiennement avec les exilé·es sur le

terrain, pour faire remonter des informations. Le service de rétablissement

des liens familiaux de la Croix-Rouge joue également le rôle d’interface

entre autorités et associations.

*« Les autorités laissent les personnes solidaires essayer d’obtenir des

informations comme elles peuvent*, déplore Flore Judet, coordinatrice de

L’Auberge des migrants. *P**ourtant le seul moyen que les personnes

solidaires ont, c’est de parler avec les exilés, d’essayer de faire du

lien, une chose qui malheureusement n’est pas faite aujourd’hui par les

autorités. »*

[image: Illustration 3] La police scientifique se rend sur la plage des

Salines près de Calais où un corps a été retrouvé rejeté par la mer, le 22

janvier 2025. © Photo Valentina Camu pour Mediapart

Les parquets, qui instruisent chaque acte de police ou de médecine légale

nécessaire à l’identification, reconnaissent sans mal leur dépendance aux

informations détenues et diffusées par les bénévoles des associations. *« **Le

“milieu des migrants” a un rapport compliqué avec les services d’enquête,

pour différentes raisons. C’est pour ça que j’ai peu de signalements de

disparitions qui viennent naturellement »*, admettait Guirec Le Bras,

ex-procureur de Boulogne-sur-Mer, interrogé sur le sujet en février 2024.

Dans le cadre des procédures d’identification, *« **il y a des enquêtes qui

sont faites dans les associations d’aide aux migrants présentes dans le

Dunkerquois et le Calaisis, pour savoir si elles reconnaissent les

personnes*, exposait pour sa part le procureur de Saint-Omer, Mehdi

Benbouzid.* D’autres fois, ce sont elles qui viennent vers nous pour nous

dire : on était censés avoir un appel d’Angleterre d’Untel, ça peut être

lui qui a disparu. Ça va dans les deux sens*. *» *

Le dialogue n’est cependant pas aussi fluide, à en croire les associations.

*« **Les contacts avec les autorités, c’est compliqué. C’est un peu de la

pêche à la ligne, on ne sait pas qui est responsable de quoi »*, déplore

une source souhaitant rester anonyme.

Une nouvelle cellule à l’efficacité limitée

Depuis peu, l’État tente d’améliorer son fonctionnement : une cellule de

gendarmerie spécialement dédiée à l’identification des corps retrouvés dans

la Manche a été créée : la Nodens. Celle-ci est constituée de cinq

enquêteurs, sous l’autorité de la préfecture maritime de la Manche et de la

mer du Nord, et dont les actes d’enquête sont là aussi réalisés à la

demande du procureur.

Elle est impliquée dans l’identification des corps retrouvés dans les

semaines ayant suivi le naufrage d’octobre 2024. Or, sept mois après, sur

les quatorze corps retrouvés, dix demeurent non identifiés. Dans les pays

d’origine, de nombreuses familles restent sans nouvelles de leurs disparus.

C’est le cas de celle d’Amanuel, disparu dans le naufrage du 23 octobre

  1. *« *Je pleure toutes les nuits », confie son père, Terfe Berhe, qui

est parti s’installer dès novembre dans la capitale de l’Éthiopie,

Addis-Abeba, pour se signaler auprès de la Croix-Rouge éthiopienne,

espérant l’envoi rapide d’un kit ADN pour identifier son fils parmi les

corps retrouvés. Pendant tous ces mois, les meilleurs amis d’Amanuel,

résidant eux-mêmes en Belgique, ont envoyé de l’argent à son père, *« pour

l’aider à rester à la capitale, où la vie est chère »*, racontent-ils.

[image: Illustration 4]

Amanuel Berhe Tirfe à droite. © Photo du téléphone Valentina Camu pour

Mediapart

C’est la nouvelle cellule Nodens qui est chargée de son cas et de l’envoi

postal du kit ADN. Or, fin février 2025, cinq mois après le naufrage, Terfe

Berhe n’avait toujours pas reçu ce précieux colis. Il est donc reparti chez

lui : « J’ai attendu tellement longtemps l’envoi de ce kit ADN. » En ce

début du mois de juin, la situation n’a toujours pas évolué : le père

d’Amanuel n’a toujours rien reçu et il n’a toujours pas d’interlocuteur

identifié à qui s’adresser. La Nodens n’a pas donné suite aux

sollicitations de Mediapart.

Les lenteurs procédurales dans le cas d’Amanuel sont dues à plusieurs

facteurs : l’absence d’un protocole clair d’envoi postal du kit ADN, la

difficulté de coordination entre les différentes Croix-Rouge éthiopienne et

européenne, et surtout l’absence de lien direct entre les acteurs de

l’identification et les proches d’Amanuel, pourtant susceptibles de fournir

un test ADN. Selon nos informations, s’agissant des complications d’envois

postaux, la cellule indique travailler avec La Poste pour faciliter le

renvoi des kits ADN sans frais pour les familles.

Des spécialistes de l’identification qui innovent

Face à ces dysfonctionnements, de nombreux chercheurs, chercheuses et

médecins légistes en Europe plaident pour le recours à de nouveaux moyens

d’identification. Depuis Liverpool au Royaume-Uni, Caroline Wilkinson,

professeure d’identification craniofaciale, dirige l’unité pour

l’identification des victimes de catastrophes migratoires (Migrant Disaster

Victim Identification). Cette unité structure un réseau qui identifie les

personnes exilées dont les corps sont retrouvés dans certaines zones

frontalières européennes.

*« Il s’agit de faciliter l’émergence de nouvelles recherches et

innovations sur le plan de l’identification. C’est important pour composer

avec les obstacles géopolitiques des pays d’origine et la disparité des

réponses politiques données par les pays où les corps sont retrouvés »*,

expose Caroline Wilkinson.

À un niveau européen, si on avait plus de possibilités d’échanger les

données, ce serait plus facile.

Tania Delabarde, médecin légiste à l’IML de Paris

Le réseau forme les acteurs de l’identification à ces nouvelles techniques.

Là où les procédés d’identification aujourd’hui se concentrent sur l’ADN,

la denture et les empreintes digitales, de nombreuses autres pistes

pourraient en fait être explorées, telles que les images qui circulent sur

les réseaux sociaux, l’analyse des courants marins

https://www.theguardian.com/science/2025/jan/02/the-nameless-dead-scientists-hunt-for-identities-of-thousands-who-tried-to-reach-europe

ou encore des caractéristiques visuelles aujourd’hui considérées comme

« secondaires » (tatouages, piercings, etc.).

En Espagne, La Croix-Rouge utilise depuis 2023

https://www.infomigrants.net/fr/post/48506/aux-canaries-la-croixrouge-espagnole-sarme-dun-nouvel-outil-pour-faciliter-lidentification-des-victimes-de-naufrages

un nouvel outil technologique développé par le CICR et l’Institut national

des sciences appliquées de Lyon. Baptisé Scan (pour Share, Compile and

Analyze, « partager, compiler et analyser »), celui-ci repose sur le

partage d’informations en temps réel sur les naufrages, la collecte de

témoignages des rescapé·es et la mise en relation avec les acteurs de la

société civile recevant les alertes des proches. Il permet d’apporter des

réponses aux proches sur les circonstances des disparitions et d’aider à

l’identification des corps retrouvés.

Médecins légistes, chercheurs et chercheuses insistent sur la nécessité

d’un partage plus approfondi des compétences et sur la mise en place d’une

coordination européenne sur ces enjeux. *« **À un niveau européen, si on

avait plus de possibilités d’échanger les données, ce serait plus facile »*,

abonde Tania Delabarde, médecin légiste à l’IML de Paris. Pour les exilé·es

qui meurent dans la Manche,* « les moyens ne sont pas mis » : « Nous, on

voudrait réveiller les consciences : ces gens-là sont morts, et en plus, on

leur nie leur identité. »*

Maïa Courtois, Maël Galisson et Simon Mauvieux

Si vous avez des informations à nous communiquer, vous pouvez nous

contacter à l’adresse enquete@mediapart.fr. Si vous souhaitez adresser des

documents en passant par une plateforme hautement sécurisée, vous pouvez

passer par SecureDrop de Mediapart, la marche à suivre est explicitée dans

cette page https://www.mediapart.fr/contact/securedrop.

Boîte noire

[image: Illustration 1]

*Cette enquête a été écrite avec le soutien du Journalismfund Europe

https://www.journalismfund.eu/. *

Au départ de cette enquête, il y a des paroles de pêcheurs de la Côte

d’Opale qui, au milieu d’une interview, racontent avoir déjà croisé lors de

leurs sorties en mer “des zodiacs vides, avec aucun passager dedans”. Ou

bien des propos de sauveteurs (en off) ou encore de bénévoles

d’associations d’aide aux migrants, à Calais ou ailleurs sur le littoral,

qui considèrent le bilan humain de la frontière franco-britannique

https://apps.lesjours.fr/morts-calais/ comme sous-estimé.

Mais comment dépasser l’a priori -voire la rumeur- quand les données

officielles, qu’il s’agisse des autorités françaises, britanniques ou

encore de l’Organisation Internationale des Migrations (OIM), concernant

les cas de disparitions de personnes exilées à cette frontière sont quasi

inexistantes ?

Au cours de cette enquête de terrain menée pendant deux ans par trois

journalistes indépendants - Maël Galisson, Simon Mauvieux, Maïa Courtois -

et une photographe - Valentina Camu -, Mediapart est allé à la rencontre

d’exilés rescapés, témoins d’atroces naufrages survenus dans la Manche ; de

familles laissées sans nouvelles de leurs proches ; de responsables

associatifs ou de professionnels de la mer faisant face quotidiennement à

des situations extrêmes sur les plages ou dans les eaux de la Manche ; de

médecins légistes et de procureurs confrontés aux corps de migrants

inconnus rejetés par la mer.

Des plages de la Côte d’Opale ultra surveillée par les forces de l’ordre

françaises aux quartiers populaires de Birmingham en Angleterre, en passant

par la Grand’place de Lille ou le quartier de la Gare du nord à Bruxelles,

Mediapart a minutieusement collecté peu à peu les informations permettant

de retracer des trajectoires d’exilés disparus. L’objectif : expliquer les

circonstances de leurs disparitions et faire entendre les voix de leurs

proches, en Europe ou dans les pays d’origine, bloqués dans l’attente de

nouvelles.

Au terme de cette enquête, Mediapart est en mesure d’établir une liste de

46 personnes exilées disparues à la frontière franco-britannique entre 2020

et 2024. Le résultat d’un travail de recoupement d’informations vérifiées

grâce à différentes sources. Chaque cas ayant par ailleurs été confirmé et

documenté directement auprès des proches de disparus, que Mediapart a

rencontrés en Europe (quand cela était possible) ou contactés par téléphone

quand ces derniers vivent en Afghanistan, en Éthiopie ou encore au Soudan.

Cette liste de 46 disparus n’est cependant qu’une estimation a minima :

pour diverses raisons (absence de réponses de proches, informations

insuffisamment étayées, etc.), certains cas de disparitions dont Mediapart

a eu connaissance n’ont en effet pas pu être intégrés dans ce recensement.