Le cimetière fantôme de Thessalonique - photos de Martin Barzilai

miladyrenoirmiladyrenoir
2024-5-3 22:25

Que reste-t-il d’un cimetière quand les tombes ont disparu ? Où vont les

pierres ? Les cercueils ? Les os ? À Thessalonique, en Grèce, existait

autrefois un cimetière juif, immense, le plus grand d’Europe avec plus de

300 000 tombes. Depuis 1492, la ville, que l’on appelait alors Salonique,

accueillait un très grand nombre de juifs, chassée d’Espagne par le pouvoir

catholique. Durant près de cinq siècles, la communauté juive fut la plus

importante de la ville. En 1942, l’occupation nazie signera la disparition

du cimetière juif. Les pierres en marbre, peuplées d’écritures

judéo-espagnoles ou françaises, furent utilisées comme matériau de

construction par les Allemands et les Grecs. Un an plus tard, 96 % de la

communauté juive encore présente dans la ville, soit 45 000 personnes,

furent déportés et assassinés, pour la plupart, au camp

d’Auschwitz-Birkenau. Aujourd’hui, Martin Barzilai, photographe et

petit-fils d’un juif salonicien, réussit l’impossible : photographier les

traces du cimetière disparu, enseveli sous une gigantesque université.

Comment ? En retrouvant, une par une, les pierres tombales utilisées pour

construire la ville moderne qui affleurent par endroit. Ses photographies,

comme autant d’archives d’un recensement mémoriel post-mortem, affirment

tout haut : ici, durant des siècles, vécurent des femmes, des hommes, des

enfants. Ils feront toujours partie des murs, des rues pavées de leurs

noms, des églises… Malgré les haines génocidaires, on ne fait pas

disparaître un peuple.