Nécrophone - Converser avec les morts

miladyrenoirmiladyrenoir
2024-4-20 09:35

Le nécrophone, l’invention oubliée de Thomas Edison pour converser avec les

morts

Nicolas Méra https://www.slate.fr/source/219984/nicolas-mera — Édité

par Thomas

Messias - 17 décembre 2023

[image: Thomas Edison et son phonographe, en 1878. |

href=”https://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9crophone#/media/Fichier:Edison_and_phonograph_edit2.jpg”>Wikimedia

Commons]

Thomas Edison et son phonographe, en 1878. | Wikimedia Commons

https://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9crophone#/media/Fichier:Edison_and_phonograph_edit2.jpg

Au XIXe siècle, la science et le paranormal

https://www.slate.fr/dossier/8187/paranormal s’entrecroisent, caressant

des fantasmes aujourd’hui réservés à la science-fiction. Comme le pointe un

journal anglais de 1853

https://ore.exeter.ac.uk/repository/bitstream/handle/10871/15953/Noakes_Victorian_Supernatural_Chapter.pdf?sequence=2,

les savants du siècle sont *«plongés d’un coup dans les profondeurs du

spiritualisme»*.

Des médecins tentent de relever des cadavres à l’aide de chocs électriques.

Pierre et Marie Curie sondent le royaume des morts au cours de sessions de

spiritisme

https://www.historia.fr/les-spirites-se-mettent-%C3%A0%C2%A0-table.

Camille Flammarion recherche, dans l’œil de sa lentille astronomique, des

mondes extraterrestres

https://www.histoire-et-civilisations.com/camille-flammarion-un-astronome-en-quete-de-mondes-paralleles-84719.php.

Le docteur Baraduc tente de photographier l’âme humaine… Étonnamment, ces

expériences https://www.slate.fr/dossier/23629/experience-scientifique

paranormales

ne sont pas le fait d’esprits dérangés. Elles sont pratiquées par des

érudits et des intellectuels jouissant d’une excellente réputation dans les

cercles scientifiques qui, brusquement, se prennent à chasser les fantômes

https://www.slate.fr/dossier/93879/fantome ou à tenter de percer les

secrets de l’au-delà. Cette tendance prend le contre-pied de la mouvance

scientiste https://fr.wikipedia.org/wiki/Scientisme, héritière du

rationalisme et des Lumières, qui tend à tout vouloir expliquer par la

raison. Dans ce contexte, le voile séparant la vie de la mort

https://www.slate.fr/dossier/397/mort semble se déchirer, et ces

pionniers veulent être les premiers à regarder au travers. Quitte à

compromettre leur fortune ou leur réputation.

Des voix dans le noir

Sur ses vieux jours, Thomas Edison penche de plus en plus vers le monde des

esprits. Du haut de ses 80 ans, l’ingénieur américain achève une carrière

riche en inventions https://www.slate.fr/dossier/4941/invention géniales:

ses recherches ont notamment permis l’avènement du phonographe (1877), de

l’ampoule à incandescence (1879) et du kinétoscope (1889).

L’homme aux 1.093 brevets

https://www.britannica.com/biography/Thomas-Edison s’intéresse

maintenant, d’après le récit qu’en fait le magazine américain Modern

Mechanix (octobre 1933), à la communication avec «l’autre côté». Au cours

de l’hiver 1920, il aurait ainsi présenté, devant un public abasourdi, un

prototype permettant

https://www.google.at/books/edition/Edison_vs_Tesla/CjaCDwAAQBAJ?hl=en&gbpv=1&dq=memoirs+thomas+edison+%22spirit+phone%22&printsec=frontcover

de

détecter les fantômes ou de communiquer avec eux. L’article ayant été

publié deux ans après la mort de l’inventeur, il est toutefois possible

d’en douter. Si expérience paranormale il y a eu, en tout cas, ses

conclusions sont inconnues.

Thomas Edison est un matérialiste convaincu, et les démonstrations des

médiums le laissent froid.

L’intérêt que Thomas Edison porte à la communication avec les esprits

https://www.slate.fr/story/196702/fantomes-croyance-explications-science-morale-ethique

ne

fait cependant pas de doute. *«Je travaille depuis longtemps à la

construction d’un appareil permettant de savoir si des individus ayant

quitté ce monde peuvent continuer de communiquer avec nous»*, affirme-t-il

dans les colonnes de The American Magazine en 1920

https://www.atlasobscura.com/articles/dial-a-ghost-on-thomas-edisons-least-successful-invention-the-spirit-phone

.

Entre les lignes, on sent que l’ingénieur

https://www.slate.fr/dossier/9967/ingenieurs n’adhère pas tellement aux

croyances spirites; peut-être veut-il seulement désavouer médiums et

charlatans qui, depuis près d’un demi-siècle, éblouissent les parterres

mondains en faisant léviter des tables ou parler des revenants.

https://www.slate.fr/story/196702/fantomes-croyance-explications-science-morale-ethiqueÀ

LIRE AUSSI

Faudrait-il croire aux fantômes?

https://www.slate.fr/story/196702/fantomes-croyance-explications-science-morale-ethique

Conversations fantômes

Pour autant, la science https://www.slate.fr/dossier/1097/science n’est

pas la première à contester les affirmations des spiritualistes. Selon une

croyance populaire à l’époque, la matière humaine serait faite de

particules minuscules –des «unités de vie»

https://journals.openedition.org/1895/5032– qui composent non seulement

sa partie organique, mais aussi sa partie spirituelle. Thomas Edison est un

matérialiste convaincu et les démonstrations des médiums le laissent froid.

Inspiré par la théorie de l’intrication quantique, notamment plébiscitée

par Albert Einstein https://www.slate.fr/dossier/16041/albert-einstein,

il est toutefois persuadé que le caractère si particulier de l’être humain

ne peut pas simplement s’évaporer après la mort. Où va donc la conscience

https://www.slate.fr/dossier/7651/conscience? La personnalité? L’âme?

L’objectif de son «spirit phone» (le terme «nécrophone» a été inventé par

Philippe Baudouin

https://www.lepoint.fr/insolite/un-necrophone-pour-fantomes-bavards-le-reve-de-thomas-edison-05-03-2015-1910323_48.php,

qui a republié les mémoires de Thomas Edison) est d’ouvrir un canal

permettant aux morts de communiquer avec les vivants.

Projet fantôme nimbé de mystère, le nécrophone n’a, selon toute

vraisemblance, jamais vu le jour.

Mais comment jeter une passerelle entre ces deux mondes que la biologie

https://www.slate.fr/dossier/3967/biologie juge irréconciliables?

Impossible de retrouver des croquis originaux de Thomas Edison, ce qui

jette encore plus d’ombre sur ce projet saugrenu. Toutefois, plusieurs

magazines ont publié des dessins de phonographes améliorés dont la

sensibilité serait capable de saisir les voix des trépassés. L’ingénieur

américain était-il réellement passé à l’expérimentation concrète, ou

n’avait-il fait qu’en saisir la théorie dans ses carnets? Une chose est

sûre: Thomas Edison croyait suffisamment en sa machine

https://www.slate.fr/dossier/45051/machine pour conclure un pacte avec

son ami William Dinwiddie

https://phys.org/news/2015-03-thomas-edison-lost-idea-device.html. Si

l’un des deux venait à mourir, il devait se signaler à l’autre depuis

l’au-delà!

Projet fantôme nimbé de mystère, le nécrophone n’a, selon toute

vraisemblance, jamais vu le jour. Certains doutent même qu’il ait jamais

existé en dehors de l’esprit du vieux «sorcier de Menlo Park», réputé pour

ses excentricités

https://www.forbes.com/sites/michaelschein/2018/10/02/thomas-edison-was-a-cranky-dude-and-other-reasons-you-should-follow-his-lead/.

Ce qui n’a pas empêché son œuvre d’être poursuivie par des ingénieurs

tendant l’oreille vers l’au-delà. En 1941, un groupe de chercheurs a tenté

de compléter le projet du génial inventeur, décédé dix ans plus tôt, afin

de passer un coup de fil à leur inspirateur

https://www.atlasobscura.com/articles/dial-a-ghost-on-thomas-edisons-least-successful-invention-the-spirit-phone.

Celui-ci n’a pas daigné répondre.