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De : Maël Galisson mael.galisson@gmail.com
Date: mar. 9 avr. 2024 à 08:59
Subject: [Jungles] Près de la Manche, toujours plus de tombes de migrants
et un inlassable combat contre l’oubli [La Provence/AFP, 08.04.2024]
To: la liste des soutiens aux exilés des jungles jungles@rezo.net
Près de la Manche, toujours plus de tombes de migrants et un inlassable
combat contre l’oubli
Par AFP
Publié le 08/04/24 à 09:11 - Mis à jour le 08/04/24 à 09:28
[image: Le panneau en bois d’une tombe indiquant “Nour et Kair Oughalime -
30-09-2010” au cimetière de Calais, le 19 décembre 2023 dans le
Pas-de-Calais]
Le panneau en bois d’une tombe indiquant “Nour et Kair Oughalime -
30-09-2010” au cimetière de Calais, le 19 décembre 2023 dans le
Pas-de-Calais
PHOTO AFP / Denis CHARLET
20 ans, Abubaker, 26 ans, Rola, 7 ans: derrière ces noms sur les tombes, le
souvenir d’un visage juvénile et d’une mort violente. A Calais, Mariam
Guerey, tente de rendre sa part d’humanité à chaque migrant décédé dans sa
quête d’Angleterre, mais la liste ne cesse de s’allonger
Cette salariée du Secours catholique fait partie du “groupe décès”,
assemblage inter-associatif constitué en 2017 pour faire respecter au mieux
les souhaits des exilés décédés, servir d’interface avec leurs familles
mais aussi tenter de redonner une identité à certains pour éviter les
enterrements sous X. Une initiative prise face à “l’absence de
mobilisation” des autorités, selon les associations.
Yasser, tué par un camion en 2021. “On a sa photo à l’accueil de jour (du
Secours catholique). Il était jeune!”. Abubaker, écrasé par un train en
Angleterre qui n’a pas pu venir (à son enterrement) parce qu’il n’avait pas
encore de papiers, mais qui est venu l’année dernière”.
[image: Des tombes au cimetière de Calais, le 19 décembre 2023 dans le
Pas-de-Calais]
Des tombes au cimetière de Calais, le 19 décembre 2023 dans le
Pas-de-Calais PHOTO AFP / Denis CHARLET
Behzad, dont le corps a été rejeté par la mer en 2020. “Il était parti
seul, sans rien, à la rame”. Mariam Guerey avait réussi à découvrir son
identité en faisant le tour des campements, grâce à la pochette plastique
qu’il portait.
“Il était chiite. La famille nous a dit de mettre un tissu noir sur la
tombe, de poser un gâteau spécial dessus”, se souvient-elle.
Les associations dénombrent 404 exilés morts dans cette zone frontalière
depuis 1999, sans compter les disparus.
Au cimetière Nord de Calais, la plupart des tombes de migrants sont de
simples monticules de terre arborant des panneaux en bois portant un nom,
une année de décès et parfois une année de naissance sur une plaque
métallique.
Avec les années, certaines s’aplanissent au point de presque se fondre dans
le sol, et les noms s’effacent.
En 2022, le Secours catholique avait lancé un appel aux dons pour
consolider les sépultures, mais seules quelques tombes ont pu bénéficier
d’une bordure en ciment.
Les cimetières constituent “le seul lieu de mémoire de la présence des
personnes exilées” à Calais, déplore Thibault, autre membre du groupe décès.
[image: Une tombe au cimetière de Calais, le 19 décembre 2023 dans le
Pas-de-Calais]
Une tombe au cimetière de Calais, le 19 décembre 2023 dans le
Pas-de-Calais PHOTO
AFP / Denis CHARLET
Entourée de cailloux blancs et fleurie, la tombe de Salim sort du lot.
Son ami Amjad, ancien migrant désormais installé à Calais, l’entretient.
“C’est important, et pas beaucoup de monde ici travaille sur ça”, explique
ce Libyen de 36 ans.
Amjad va aussi aux enterrements quand son travail de soudeur le lui permet
et commémore la mort de son ami par un repas annuel.
Les exilés, dont beaucoup sont Soudanais ou originaires du Moyen-Orient,
occupent une large partie du carré musulman du cimetière Nord, qui est
presque plein.
“La création d’un autre espace confessionnel au sein des cimetières de
Calais est à l’étude”, indique la mairie.
[image: Des tombes au cimetière de Calais, le 19 décembre 2023 dans le
Pas-de-Calais]
Des tombes au cimetière de Calais, le 19 décembre 2023 dans le
Pas-de-Calais PHOTO AFP / Denis CHARLET
Dans un autre carré musulman, dans un cimetière de Grande-Synthe, près de
Dunkerque, un petit signe en peluche a été déposé sur une tombe couverte de
tulipes: celle de Rola, une fillette irakienne de 7 ans, morte dans un
naufrage le 3 mars.
A Calais, les exilés d’une autre confession ou bien non identifiés sont
inhumés dans “le carré des indigents”, où les sépultures sont conservées
“cinq ans minimum”, explique la mairie.
Quand la religion du défunt est inconnue, “on fait deux prières devant la
tombe, une musulmane et une chrétienne”, rapporte Mariam Guerey.
Certaines familles parviennent à financer le coûteux rapatriement de la
dépouille, comme celle d’un Éthiopien mort en novembre dernier, mais
beaucoup d’autres ne verront jamais la sépulture de leur enfant.
Rapatrier un corps en Syrie coûte ainsi 6.000 à 8.000 euros, explique
Mariam Guerey.
Quand la famille se résout à un enterrement en France, le groupe décès aide
à financer les obsèques, avec la communauté concernée.
Alors qu’un enterrement musulman intervient généralement très vite après le
décès, les délais nécessaires pour identifier officiellement certains corps
sont douloureux pour les familles.
L’identification qui auparavant “se fondait sur des témoignages, avec la
concordance des papiers” exige “de plus en plus (…) des preuves
primaires, comme des tests ADN”, allongeant les délais, regrette Thibault.
Sur les cinq morts d’un naufrage mi-janvier, trois n’avaient pas encore été
inhumés fin mars.
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