La Peaulogie - Revue de sciences sociales et humaines sur les peaux - Nous contacter contact@lapeaulogie.fr

miladyrenoirmiladyrenoir
2024-4-3 17:31

*RÉSUMÉ: *Le destin du vivant étant la mort, qu’en est-il de la carnation,

des os et de la peau ? La peau est naturellement sujette à une

thanatomorphose, face à laquelle les humains réagissent par l’acceptation,

le déni ou l’intervention.

Entre dessèchement et pourrissement, entre vie, mort et survie, la peau

joue le rôle du memento mori et tient une place cruciale dans le symbolique

qui irrigue toutes les cultures.

Ce numéro thématique de La Peaulogie s’adresse aux biologistes et

dermatologues, aux historiens, anthropologues et ethnologues,

aux historiens de l’art (peinture, sculpture, cinéma, littérature), des

sciences et de la médecine, aux psychanalystes, aux exégètes et aux

théologiens. L’éventail le plus large possible est souhaité, afin de rendre

compte au mieux de l’ampleur du sujet. Le destin du vivant étant la mort,

qu’en est-il de la carnation, des os et de la peau ? La peau est

naturellement sujette à une thanatomorphose, face à laquelle les humains

réagissent par l’acceptation, le déni ou l’intervention. Le destin le plus

commun est celui de la putréfaction. Pas seulement après la mort mais aussi

dès le vivant avec des pathologies (pus, gangrène, lèpre, éruptions

cutanées), des accidents (brûlures, déshydratation), la privation de

nourriture forcée (camps de concentration) ou choisie (ascèse, grève de

la faim). Les civilisations sont traversées par une fascination pour cet

entre-deux qu’est la peau des morts-vivants, qui garde les stigmates du

pourrissement, ou par la peau préservée des morts qui traduit la

promesse chrétienne de la Résurrection des corps décomposés. Les rituels

antiques, notamment en Égypte, pratiquent la momification qui, par

l’assèchement au natron, tend à la préservation de la peau par sa

dessication. On peut retrouver cette préservation dans les civilisations

amérindiennes. L’embaumement a continué de se faire plus récemment (Lénine,

Kim Il-Sung). Un cas particulier est celui de l’hagiographie chrétienne,

qui évoque des dépouilles exemptes de putréfaction (sainte Thérèse) ou

exhalant un parfum floral (l’ « odeur de sainteté »), des stigmates exempts

de pourrissement (Padre Pio). La dessication ⁄ préservation peut être

naturelle ou issue de procédés volontaires, mais peut aussi apparaître

comme miraculeuse. Dans tous les cas, ces phénomènes dermiques ont inspiré

les arts. Ainsi dans les « transis » de Guillaume Lefranchois, Jacques du

Broeucq et Ligier Richier aux XVe et XVIe siècles ou L’illumination de S.

François Borgia de Pietro Della Vecchia au XVIIe siècle. Ils nourrissent

aussi la littérature (Villon, Camus, Baudelaire, Flaubert, Thomas Mann) et

le cinéma (Franju). Entre dessèchement et pourrissement, entre vie, mort et

survie, la peau joue le rôle du memento mori et tient une place cruciale

dans le symbolique qui irrigue toutes les cultures. Ce numéro thématique

s’adresse aux biologistes et dermatologues, aux historiens, anthropologues

et ethnologues, aux historiens de l’art (peinture, sculpture, cinéma,

littérature), des sciences et de la médecine, aux psychanalystes, aux

exégètes et aux théologiens. L’éventail le plus large possible est

souhaité, afin de rendre compte au mieux de l’ampleur du sujet.

Bertrand Lançon, coordinateur du numéro thématique -

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